4.1.06


« L'eau de ces bois sombres
Est si pure et si uniquement fluide
Et consacrée en cet écoulement de source
Vocation marine où je me mire. »


L'eau, bien sûr, est partout la même, de Sainte-Catherine-de-Fossambault à North Vancouver. C'est ce qui nous la rend si précieuse. L'eau qui coule en nous n'est pas différente, elle ne fait qu'emprunter des lits plus mystérieux, que suivre les rythmes étranges de marées par nous inconnues. Que n'avons-nous pas pour nous-mêmes, comme nous avons pour la mer, ces cartes, ces horaires qui nous permettent de mieux connaître les montées, les descentes! Mais alors périrait le mystère, et nous avec. Le mystère que l'on tente de repousser dans ses plus intimes retranchements, pour découvrir seulement qu'il change de forme, s'expand, se glisse, s'étire et en fin de compte trouve toujours le moyen de nous couler entre les doigts. C'est le cadeau qu'il a à nous offrir. Et l'eau, ma foi, l'eau n'est-elle pas la forme la plus physique du mystère?

Tu fracasses des granits jusqu'à en faire des seins arrondis qu'enfin tu t'attardes à caresser.
Tu graves au coeur de la terre le tracé de filons possibles et, sans attendre que l'or vienne s'y coucher, tu repars, plongeant dans l'obscurité.
Tu laves des terres incessamment sales, apparemment heureuse de ce geste toujours à refaire.
Tu coules, coules, coules le long de routes rocailleuses que tu crées pour toi-même, flairant le fleuve qui t'attend.
De la mer à la goutte, tu distille ton esprit sur le monde et le rends plus moelleux.
Tu noies aussi, parfois. Tu noies.
Tu emportes les corps et te les appropries. Mais ne t'appartiennent-ils pas déjà?

Mystère.