14.8.06

Je ne devrais plus écrire le soir. Trop d'heures dans le corps, déjà, trop de pas, de regards et de mots, de présence à l'écran. Malheureusement, c'est le seul temps qui reste.

La nuit est un temps magnifique, cependant, comme une autre journée, un envers, un repos. Son personnage fatigué accroché au clou près de la porte, chacun est un petit peu plus soi-même, le silencieux soi-même, celui qui n'a rien à gagner. D'une certaine façon, c'est comme si le soleil réellement se levait. Si l'on peut avoir encore des forces, ou au moins un air d'aller, ou un second souffle, c'est l'idéal, chaque soir un pays nouveau à explorer, un monde où les couleurs sont à inventer.

Je voulais dire combien j'aime la chandelle... mais les mots me manquent, deviennent poussière avant même que j'aie eu le temps de les rassembler en troupeau. Et puis entretemps j'ai ouvert un peu la fenêtre, et ma chandelle a du mal à tenir, la nuit souffle et veut l'éteindre pour régner (elle a raison), pour me faire une faveur, et aux autres aussi, nous montrer ce dont elle est capable. La chandelle se défend comme elle peut, mais elle n'a aucune chance; la victoire va à qui a du souffle.

La nuit règne sur moi comme règne la fée sur les marins d'Ulysse. Il me faudrait résister mais mon corps au contraire veut cette dépendance, navire qui cherche à devenir épave. Tout devient si facile pour l'épave.

Mais les planches dont je suis fait craquent et résistent pourtant, désirant tenir la mer le plus longtemps possible et voir tant qu'il y en a des étoiles... Et l'écume, la vraie patrie des voyageurs, et le vent qui nous pousse -- vers quoi?

Ma chandelle dégouline, mais elle tient toujours le coup.