22.1.06


Ce soir, nous avons joué aux porteurs de feu. Un rôle qui me plaît bien. À la faveur d'une fête de quartier bien païenne, comme je les aime, nous avons rejoint nos voisins et autres gens du quartier autour du bassin du parc Hastings. Céline avait passé la journée à fabriquer des lanternes, avec mon aide par moments, et nous étions donc bien équipés pour aller braver la nuit et le froid. Nous n'étions pas seuls. J'aime ces événements un peu gratuits, inventés de toute pièce pour défier l'ordinaire. Feu, musique, lanternes: il n'en faut pas plus pour créer quelque chose qui touche à la magie. Dans le parc, on avait placé des lampions partout, et des bandes de jongleurs faisaient tournoyer leurs cordes enflammées et leurs boules de feu dans des danses primordiales au son de tambours profonds. Une des femmes avait des genres d'encensoirs, sauf qu'au lieu de l'encens, c'étaient deux boules de feu qu'elle avait au bout de ses chaînes et qu'elle faisait valser dans tous les sens. Le feu, le feu dont nous ne sentions même pas la chaleur nous réchauffait pourtant et nous rendait joyeux. Plus tôt, un brass band avait joué «Let me stand next to your fire» de Jimi Hendrix pour mener la marche à travers le parc. Il y avait une drôle de tension entre cette musique de pulsion, les corps à demi nus des jongleurs, que doraient les flammes jaunes et bleues de cordes enflammées et tournoyantes, les tambours qui nous faisaient débattre le coeur, et le public de petites familles comme la nôtre qui déambulait tranquillement dans le noir. C'était génial. Le spectacle final, peuplé de cracheurs de feu, de jongleurs de feu, d'avaleurs de feu, valait l'invention de la nuit. Nous aussi, nous avons été porteurs du feu.