11.1.06

Un moment ce matin la rue semblait neuve. Le matin n'était plus aussi noir, les roues du vélo mordaient bien dans l'asphalte, il flottait un air plus doux, plus sec. Alors, j'ai vu par terre des morceaux de ciel tombés. Le ciel! Il existait donc encore, celui-là, avec son bleu à peine né, celui qu'on voyait avant les levers de soleil de la légende... Et ces morceaux d'une couleur fraîche et toute liquide m'ont fait lever les yeux vers le haut, et le mouvement de mes jambes s'est ralenti un instant, et j'ai vu l'infini qui se trouve dans un matin ouvert. J'avais l'impression que les grands vents inaccessibles des hauteurs venaient faire un tour jusqu'ici, et pouvaient entrer dans mes poumons humides et les sécher un petit peu. Le rideau des nuages s'était entrouvert sur un demi-ciel, créant un trou bénéfique qui réellement aspirait toute pensée monotone, et même toute pensée, point. L'esprit profitait un moment d'une liberté inattendue, ou plutôt d'un simple mouvement de sourire, le sourire de l'esprit, qu'accompagnait un soupir, le même que peut nous extraire une fleur ou une montagne.

Une heure durant, on a même pu les voir, les montagnes! Et puis le rideau s'est refermé, comme pour nous faire désirer plus ardemment le prochain acte. Il me reste en tête mes morceaux de ciel tombés...