12.7.06

Enfin...

Enfin les feuilles me parlent. Nous sommes seuls, elles et moi, dans la cour de la maison paternelle. Bon, il y a les maringouins, aussi, mais le dialogue avec les arbres vaut bien ce désagrément. Et puis il faut qu'elles vivent aussi, pauvres bêtes!

Mais -- n'est-ce pas vrai que ce qu'on murmure est ce qui a le plus d'importance? Et à ce compte, les arbres sont parmi les plus francs parleurs. Car il ne faut pas parler trop fort pour pouvoir les entendre: c'est à ce prix peut-être que la franchise est offerte. Oui, le silence est le terreau qui permet à bien de belles choses d'éclore.

Et tandis que mes yeux se font à la noirceur relative (ô combien, pour un soir, j'aimerais connaître la noirceur médiévale!), que je déchiffre une à une les quelques étoiles qui parviennent à crier leur lumière jusqu'ici, les feuilles s'unissent pour me chanter leur journée. Elles sont légères: c'est la nuit et le temps enfin de se raconter, de dire tout et rien, de partager ces petites choses qui font que la vie est salée, et que sous la chaude molesse du jour on n'avait pas le goût ni la force de dire.

Qu'il est beau le langage des feuilles! Il est chantant comme les parlers de la Méditerranée, mais profond comme la Boréalie. C'est un parler doux et autoritaire à la fois, une langue de savoir et d'intuition. Il fera chaud demain encore, alors les feuilles ont beaucoup à dire.

Et moi, tel un saint Jean qui écouterait en espérant pouvoir mettre tout ça sur papier, je me tiens prêt, plume à la main*, et j'attends...


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* Ou ce qui en tient lieu en ces temps où l'enluminure n'a plus cours.