5.7.06

Il y avait de la musique à la télé, tout à l'heure. On alternait entre le quatuor et le duo piano-voix. J'aime bien regarder ce genre d'émission; seulement, j'aimerais avoir une installation sonore de qualité, et j'aimerais qu'on présente la musique classique dans un autre décor qu'une sorte de salon imaginaire du XIXe siècle. Tout y était: draperies de velours, robes que personne ne porte, colliers de perles, noeuds papillon. Et cette chanteuse qui regardait droit devant elle, elle n'avait de toute évidence pas l'habitude de la caméra. J'aurais voulu des jeans et des t-shirts, des chemises belles et actuelles, des décors ordinaires ou alors évocateurs tout en n'étant pas fait de poussière. Mais la musique était belle. Très classique: La Truite, un Nocturne de Chopin, etc. Et pourtant, il y avait ce lied que je n'avais jamais entendu: Erlkönig. Très connu aussi, paraît-il, mais je l'entendais pour la première fois. Je ne suis pas amateur de lieder, ceci dit, et dans celui-ci, c'est le jeu du piano qui m'interpellait le plus. Énergique. Urgent. J'y reconnaissais bien cet esprit passionné de Schubert, qu'avec le recul de l'histoire je suis tenté de qualifier de «qui n'a pas de temps à perdre». Et pourtant bien d'autres de ses oeuvres font probablement mentir cette description. Enfin.

Tout ça me faisait penser au génie, au fait que l'on joue encore Schubert aujourd'hui, à la télé par exemple. À ce qu'un homme peut laisser en héritage, cette richesse incomparable donnée à des générations de semblables. Nous sommes tentés de dire, aujourd'hui, que la vie de Schubert a été riche, bien que courte, puisqu'il nous a laissé tant de choses belles, importantes, transcendantes. Mais je me suis demandé si Franz lui-même n'aurait pas échangé un peu de tout ça contre une vie plus longue, d'une durée ordinaire...

Évidemment, on ne peut pas poser de tels problèmes. Tant mieux, d'ailleurs. Mais tout de même, dans l'intro intense d'Erlkönig, j'entendais cette question impossible.

3 Comments:

At 04:41, Anonymous Anonyme said...

Je ne suis pas sûre que ça t'intéresse, mais Erlkönig est au départ un poême de Goethe, dont voici le très beau texte et sa traduction. N'importe quelle personne parlant allemand connait ce texte de Goethe !

"Wer reitet so spät durch Nacht und Wind ?
Es ist der Vater mit seinem Kind;
Er hat den Knaben wohl in dem Arm,
Er faßt ihn sicher, er hält ihn warm.

Mein Sohn, was birgst du so bang dein Gesicht ? -
Siehst Vater, du den Erlkönig nicht ?
Den Erlenkönig mit Kron und Schweif ? -
Mein Sohn, es ist ein Nebelstreif. -

"Du liebes Kind, komm, geh mit mir !
Gar schöne Spiele spiel ich mit dir;
Manch bunte Blumen sind an dem Strand,
Meine Mutter hat manch gülden Gewand."

Mein Vater, mein Vater, und hörest du nicht,
Was Erlenkönig mir leise verspricht ? -
Sei ruhig, bleibe ruhig, mein Kind !
In dürren Blättern säuselt der Wind. -

"Willst, feiner Knabe, du mit mir gehn ?
Meine Töchter sollen dich warten schon;
Meine Töchter führen den nächtlichen Reihn
Und wiegen und tanzen und singen dich ein."

Mein Vater, mein Vater, und siehst du nicht dort
Erlkönigs Töchter am düstern Ort ? -
Mein Sohn, mein Sohn, ich seh es genau:
Es scheinen die alten Weiden so grau. -

"Ich liebe dich, mich reizt deine schöne Gestalt;
Und bist du nicht willig, so brauch ich Gewalt."
Mein Vater, mein Vater, jetzt faßt er mich an !
Erlkönig hat mir ein Leids getan! -

Dem Vater grauset's, er reitet geschwind,
Er hält in den Armen das ächzende Kind,
Erreicht den Hof mit Mühe und Not;
In seinen Armen das Kind war tot."


Alors, voici la traduction !!

Quel est ce cavalier qui file si tard dans la nuit et le vent ?
C'est le père avec son enfant;
Il serre le jeune garçon dans son bras,
Il le serre bien, il lui tient chaud.

Mon fils, pourquoi caches-tu avec tant d'effroi ton visage ?
Père, ne vois-tu pas le Roi des Aulnes ?
Le Roi des Aulnes avec sa traîne et sa couronne ?
Mon fils, c'est un banc de brouillard.

"Cher enfant, viens donc avec moi !
Je jouerai à de très beaux jeux avec toi,
Il y a de nombreuses fleurs de toutes les couleurs sur le rivage,
Et ma mère possède de nombreux habits d'or."

Mon père, mon père, et n'entends-tu pas,
Ce que le Roi des Aulnes me promet tout bas ?
Sois calme, reste calme, mon enfant !
C'est le vent qui murmure dans les feuilles mortes.

"Veux-tu, gentil garçon, venir avec moi ?
Mes filles s'occuperont bien de toi
Mes filles mèneront la ronde toute la nuit,
Elles te berceront de leurs chants et de leurs danses."

Mon père, mon père, ne vois-tu pas là-bas
Les filles du Roi des Aulnes dans ce lieu sombre ?
Mon fils, mon fils, je vois bien:
Ce sont les vieux saules qui paraissent si gris.

"Je t'aime, ton joli visage me charme,
Et si tu ne veux pas, j'utiliserai la force."
Mon père, mon père, maintenant il m'empoigne !
Le Roi des Aulnes m'a fait mal !

Le père frissonne d'horreur, il galope à vive allure,
Il tient dans ses bras l'enfant gémissant,
Il arrive à grand peine à sa cour (de ferme);
Dans ses bras l'enfant était mort.

 
At 08:31, Anonymous Anonyme said...

Erlkönig est Le lied de Schubert qui me touche le plus. Une seule fois j'ai entendu le rôle de l'enfant interprété par un enfant, à la voix unique bien évidemment, d'une pureté! J'ai cherché à retrouver l'enregistrement de CETTE interprétation, sans succès hélas! Et chaque fois qu'une cantatrice joue le rôle de l'enfant, quelque soit sa voix d'or, elle n'arrive pas pour moi à la cheville de cet ange. Mais j'écoute toujours avec bonheur le Erlkönig et j'ai apprécié en lire la traduction. Il faut se rappeler également de Schubert les merveilleux chants Wintereise et qu'est-ce que c'est beau lorsqu'ils sont chantés par Dietrich Fischer-Diskau!

 
At 11:59, Blogger Christian said...

Merci Léonor,

bien sûr que ça m'intéresse! Un jour, peut-être, je pourrai apprendre l'allemand?

 

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