29.1.06

Ça y est, le rythme a été rompu. Après cent quarante et quelque jours, je suis tombé pour la première fois(!!!). J'ai de bonnes raisons: malaise, épuisement. Peu importe. En fait, je suis assez content. Souvent en quête de perfection, je suis aussi souvent, on peut s'en douter, déçu. Alors cette craque dans le continuum blogal, ça me plait. Comme un plafond devient plus sympathique grâce à une mince fissure dessinant ce que l'imagination veut bien y voir, comme la peinture d'un vieux meuble s'efface par endroits pour laisser découvrir des couches et une histoire plus anciennes que ce qu'on imaginait, comme un silence dans une conversation fait comprendre des choses qu'on n'arrivait de toute manière pas à dire, un temps d'arrêt peut introduire une imperfection bienfaitrice. Les japonais ont un terme pour ce genre de chose: wabi-sabi. C'est-à-dire quelque chose comme: comment l'imperfection rend une chose plus belle encore. C'est vrai: la perfection, pour peu qu'elle existe, ce qui est discutable d'ailleurs, est plate. Ce n'est qu'une idée de l'esprit. Une bonne image de ça: les filles des magazines de mode, auxquelles on enlève un bouton, blanchit des dents, étire la ligne d'un sourcil, efface une ride ou encore copie un coin de sourire, jugé plus radieux, pour le coller au côté opposé de la bouche. C'est la perfection telle que vue par un «directeur artistique». Tout ça n'est que du vent. Au contraire, chacun de ces petits riens qui font qu'une personne, qu'une chose est rendue unique, même quand ce petit rien conffine au désagréable, a quelque chose de rassurant. Un poil mal placé dans un visage, un oeil un peu plus haut qu'un autre. Une tache accidentelle dans la glaçure d'une poterie. Une formule surfaite dans un texte autrement bien mené... Ah! On souffle un peu, on respire normalement, on se trouve bien ici, dans le vrai monde, dans la bonne compagnie des humains, cette compagnie qui elle aussi connaît des ratés, des imperfections, mais qui est cependant si riche et puis, de toute manière, qui est tout ce que nous avons. Tiens, à la faveur d'une pause dans l'écriture, j'en profite pour ronger un de mes ongles: une vieille mauvaise habitude dont je n'ai jamais su me défaire tout à fait. Bon, je suis allé trop loin, ça saigne un peu, gros nono. Désir inconscient de rendre mon corps imparfait? Ce geste n'était pourtant pas nécessaire pour y parvenir! Allez, je suis dans de bonnes dispositions, j'accepte tout tel quel, avec craques, rides, taches et ongles rongés. La vie, d'une façon étrange, n'en est que plus belle, ou en tout cas plus vraie.

1 Comments:

At 11:03, Anonymous Anonyme said...

Quelqu'un, en fait un de mes proches, m'avait, il y a quelques années, fait parvenir un texte sur le wabi-sabi. Je tente de le retrouver dans mes précieuses boîtes qui recueillent de chères lettres. Un rafraîchissement de mémoire qui sera certainement bénéfique pour moi, imparfaite.

 

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