14.5.06

«Éric, je ne t'oublierai jamais.» La petite annonce avait paru une seule journée, et ceux qui l'avaient lu en cherchant un ordinateur pas cher ou un lit king usagé avaient cru à une erreur. Quelques-uns, peut-être, avaient souri. Mais la journée finissait dans la pluie, et la ville était grise. Les exemplaires qui n'avaient pas encore été mis au panier attendaient, inutiles, sur les étals des kiosques à journaux dont on commençait à refermer les portes. La grande cohue du soir était passée. Un vent se levait avec les premiers signes de la nuit. Près de la bouche de métro, le dernier journal d'un marchand se libéra de la barre de métal qui ne le tenait que faiblement. Les pages volèrent, portées par le souffle, légères, pleines de mots éphémères. Le marchand, penché vers d'autres boîtes, ne vit rien tandis que la petite annonce, essouflée, se déposait sans bruit contre l'asphalte. Héroïquement, l'encre tenait le coup dans son lit de papier imbibé d'eau sale.

Quelque part, une jeune fille regardait le mur d'un salon, le mur et la fenêtre. La pluie, toujours. Il était probablement déjà ailleurs. Et puis il ne lisait pas les journaux. Mais il était important de dire les choses. Même trop tard.