28.10.05

Bonjour. Tu es là? Oui, je sais que tu es là. Je sais que tu écoutes. Je sais que tu ne répondras pas. Alors je vais tout te dire. Et puis je vais m'en aller. J'ai hâte. Je vais prendre le train vers le sud. J'arrêterai quand l'envie m'en prendra, quand je sentirai que l'air est propice. Quand il fera beau.

Tu n'as rien compris, hein? Tu n'as jamais compris que je t'aimais. Je ne sais pas ce que j'aurais pu faire de plus. Ou dire. Mais je ne me pose même plus cette question-là, maintenant. Les femmes! On veut toujours régler les situations, aider l'autre. On est prêtes à sortir de nous-mêmes pour vous. À devenir d'autres, parfois. Maintenant, j'ai compris que je ne devais plus jamais faire ça. Si tu ne comprenais pas à quel point je t'aimais, ce n'est pas à moi de te le faire comprendre. Peut-être que ce n'est pas moi qu'il te fallait, tout simplement.

J'ai hâte de dépasser Boston. Tu te rappelles? Oui, évidemment. Je ne m'arrêterai pas à Boston, bien que j'aie beaucoup aimé cette ville. Je vais la regarder passer. Il y aura peut-être un arrêt. Les gens sortiront, entreront, placeront leur bagage. Je serai peut-être tentée de sortir, mais je ne le ferai pas. Et quand le train repartira, je serai heureuse d'avoir vaincu cette tentation. La côte s'étendra devant moi, inconnue. Infinie. Je peux continuer jusqu'au Guatemala, si je veux. Je suis libre. Tout est arrangé.

Je suis libre, mais je suis obligée de partir. Tu vois, tu as encore cet effet sur moi. Tu me coûtes cher. Très cher. Bon. Je te laisse une autre fois. Une dernière fois. Je te laisse avec ma voix enregistrée. Tu peux l'effacer. Ça ne me dérange pas.