3.11.05


Évasions...

Sur nos écrans d'ordinateur, nous mettons des paysages. Le mien, au travail, montre un beau lac québécois tranquille, vivant, sur lequel un kayak a laissé une traînée paisible. Le gars dans le kayak, vu de dos, se dirige vers cet endroit magique: les eaux peu profondes du bord du lac, près d'une berge touffue d'arbres aux branches qui trempent dans l'eau. Sur mon portable, on voit le gravier spiralique, galaxien, d'un jardin zen bien entretenu.

Sur les murs de nos appartements, nous mettons des images: tableaux, affiches invitant au pays d'un film, photos de nous-mêmes et de nos aimés en d'autres lieux, en d'autres temps.

Nous ouvrons des fenêtres dès que nous en avons l'occasion. Nous cherchons l'air d'ailleurs, même si ce doit être celui d'un ailleurs imaginaire. Et s'il n'y a rien, si les murs sont vides, nous en dessinons.

Quel est ce besoin d'autres paysages, d'autres lieux, d'autres vues que celles qui sont là, réelles, sous nos yeux? Pourquoi nous embarasser d'images alors qu'il suffit probablement, fort probablement, de ralentir la vitesse à laquelle nous faisons passer notre regard sur quelque chose pour faire une découverte? À côté de moi, l'ombre de la chandelle et du bougeoir, sur la table, crée une balle sombre et mouvante qui vibre à mesure que j'écris. Une balle d'ombre: ce que la chandelle ne peut effacer.

Est-il merveilleux, est-il désespérant, ce besoin de se projeter ailleurs? De s'inventer des bambous sur un mur en béton? C'est peut-être la nature grise du béton qui nous pousse à être imaginatifs. Nous refusons la grisaille de la commodité! Sur les pavés, dessinons des plages!

Allez, à vos craies!